Communiqué de presse – Présidentielles 2022 : les bonnes et les moins bonnes idées des candidats #1

Paris, le 3 mars 2022. À l’approche des élections présidentielles (premier tour le 10 avril 2022), les candidats vont nécessairement se positionner sur l’accès aux soins et rivaliser de propositions sur le sujet de la santé. ReAGJIR, le syndicat représentatif des jeunes généralistes (remplaçants, installés depuis moins de 5 ans et universitaires), distribue les bons et mauvais points des premières idées évoquées concernant l’organisation des soins.

Obliger les jeunes médecins à s’installer sur un territoire qu’ils n’ont pas choisi : mauvaise idée

Présentée sous différents mots et formes, plusieurs candidats proposent de forcer les jeunes médecins à aller s’installer, pendant ou à la fin de leurs études, dans des territoires sous-dotés pendant une durée plus ou moins limitée dans le temps. « Des mesures de régulations de l’installation ont été mises en place dans certains pays européens comme en Allemagne par exemple et cela n’a pas permis d’améliorer l’accès aux soins. Ils en ont fait l’expérience et il en ressort qu’une telle mesure n’est pas pertinente. », explique le Dr. Agathe Lechevalier, Présidente de ReAGJIR. « De plus, c’est vraiment méconnaître le profil et les attentes des jeunes médecins. Ce sont des jeunes qui ont au moins 25 ans et viennent de finir au minimum 10 ans d’études. Ils sont souvent en couple, parfois avec des enfants, et ont les mêmes attentes que la plupart des Français : bénéficier d’un cadre de vie agréable et pratique, permettant de scolariser leurs enfants, au conjoint de trouver un travail, de faire ses courses facilement, de travailler en réseau avec d’autres professionnels de santé pour une permanence des soins… », ajoute le Dr. Agathe Lechevalier. « Les forcer à s’installer dans un territoire qu’ils n’ont pas choisi c’est le meilleur moyen de les rebuter de leur métier et ça ne garantit pas une installation pérenne dans le temps. »

Salarier les médecins/développer massivement les centres de santé : une solution limitée

Au moins 4 candidats proposent de salarier les médecins ou de développer les centres de santé (dans lesquels les médecins sont salariés) de manière conséquente. « L’idée en soi n’est pas mauvaise mais il faut tenir compte des réalités : la majorité des généralistes ne souhaite pas être salariée mais exercer en libéral. Ils sont 72%1 des internes à envisager une installation libérale contre 19% une installation salariée pure. Développer les centres de santé peut donc être une solution partielle à la désertification médicale. Ce type de centres implique aussi le recrutement de secrétaires et une gestion compétente. », détaille le Dr. Agathe Lechevalier.

Répartir différemment l’offre de soins : une belle idée impossible à réaliser

« Favoriser l’implantation des maisons de santé », « offrir à tous les Français un accès aux soins à moins de 30 minutes de son domicile en divisant par deux le délai moyen pour obtenir une consultations chez le médecin », « reprise des permanences des médecins libéraux le week-end », « lutter contre les déserts médicaux en favorisant le recrutement des médecins publics, en augmentant les moyens des facultés de médecine en vue d’une suppression du numérus clausus », « dans les zones denses un médecin ne doit s’installer que pour remplacer un départ »… sont autant de propositions des candidats qui ne tiennent pas compte de trois réalités importantes. Le Dr. Agathe Lechevalier explique : « Tout d’abord, il n’y a pas de zone surdotée en France : le pays est un désert médical, dans des grosses villes comme en rase campagne. Ensuite créer de nouveaux établissements, quelle qu’en soit la forme, ne peut fonctionner que s’il n’y a des médecins dedans et c’est là que le bât blesse : nous perdons en moyenne 1000 généralistes chaque année. Il n’y aura pas assez de médecins pour tout le territoire. C’est pour cela que nous défendons la délégation de tâches, le travail en réseau de professionnels de santé, que nous voulons nous installer à plusieurs… Vouloir désengorger les hôpitaux est louable mais la médecine de ville se porte aussi mal que la médecine hospitalière aujourd’hui : nous manquons de professionnels. Enfin, certes le nombre de médecins va croître dans une dizaine d’années (réforme du numerus clausus), mais il faut suffisamment de terrains de stage pour accueillir et former ces futurs médecins, que ce soit en ville ou à l’hôpital. Aujourd’hui il n’y en a pas assez. »

Un plan d’investissement massif : oui mais…

Plusieurs candidats parlent aussi d’investir massivement pour lutter contre les déserts médicaux. Si c’est pour renflouer l’hôpital qui souffre, aider à créer les murs d’établissements de soins (pourvu qu’il y ait des médecins associés dès le début au projet), financer des formations, salarier des professionnels de santé…, cela peut aider. « Quand on voit aujourd’hui les difficultés qu’a la France à financer et soutenir ses hôpitaux, il semble utopique de penser que l’on y investira massivement demain. Et le manque cruel de professionnels, usés, fatigués, ne va pas dans le sens de meilleurs jours. », déplore le Dr. Agathe Lechevalier. « Quant à payer plus des médecins qui iraient dans des déserts médicaux, cela ne suffira pas. L’argent n’est pas le moteur principal des jeunes médecins. Plusieurs études l’ont prouvé et on a vu de nombreux maires surenchérissant pour faire venir des médecins déçus des résultats. En revanche, une garantie financière aux débuts d’une installation, une meilleure protection sociale et un vrai accompagnement aux premiers pas nous semblent être de bonnes idées. »

« Nous voyons bien que tout le monde cherche à s’emparer du sujet de l’accès aux soins et c’est normal. Nous sommes conscients de cette difficulté quotidienne que rencontrent les Français et la déplorons. », conclut le Dr. Agathe Lechevalier. « Il y a aussi quelques idées prometteuses ou intéressantes dans les propositions comme mettre en place une coopération renforcée entre ville et hôpital, alléger les tâches administratives des soignants, simplifier certaines procédures, développer la télémédecine… Nous nous tenons d’ailleurs à la disposition des candidats qui souhaiteraient connaître nos solutions concrètes et réalisables. »

À propos de ReAGJIR

ReAGJIR est le Regroupement Autonome des Généralistes Jeunes Installés et Remplaçants en France. Créé en janvier 2008, ce syndicat regroupe et représente les remplaçants en médecine générale, les médecins généralistes installés depuis moins de 5 ans et les jeunes universitaires de médecine générale (chefs de clinique, maîtres de stage des universités, enseignants de médecine générale). Fédération de syndicats régionaux, la structure accompagne et défend l’exercice du métier par ces trois types de professionnels et milite pour la construction d’un système de santé à l’image des jeunes généralistes : innovant, collaboratif, humain et solidaire. ReAGJIR C/O Collège de la Médecine Générale 6 place Tristan Bernard 75017 PARIS

Contacts presse


1 Source : Enquête menée par la commission jeunes médecins du CNOM en 2019 sur les déterminants de l’installation chez les internes, les remplaçants exclusifs et les installés