Un essai clinique est une étude expérimentale dont l’objectif est de juger de la causalité entre un facteur et un état. Pour cela on réalise une expérience qui est une observation dans laquelle on contrôle l’exposition au facteur étudié.

Le facteur étudié peut être un médicament mais aussi un traitement chirurgical, une stratégie de dépistage, une intervention éducative, etc. De même, l’état étudié peut être la maladie, la guérison, l’état des connaissances, etc. Ainsi le chercheur effectue différentes interventions sur différents groupes d’individus et compare leur efficacité[1].

Types d’étude

  • Essai contrôlé randomisé (ECR) : les sujets sont tirés au sort quant à l’attribution de l’intervention. C’est la méthode de référence.
    • Étude pragmatique : étudie le bénéfice de l’intervention dans des conditions pratiques (« in vivo »).
    • Étude explicative : étudie l’efficacité théorique de l’intervention dans des conditions idéales (« in vitro »)
  • Essai contrôlé non randomisé (ECnR) :
    • Étude ici-ailleurs : on compare 2 groupes distincts géographiquement, l’un reçoit l’intervention, l’autre pas. Risque de biais de sélection et de confusion.
    • Étude avant-après : on compare un même groupe avant et après une intervention. Risque de biais de confusion notamment dû à l’évolution naturelle de la maladie.

Choix du comparateur

Pour choisir le groupe de comparaison, on a deux possibilités en fonction de la pathologie :

  • Soit on dispose d’un traitement efficace, le comparateur devrait être ce traitement de référence ;
  • Soit on ne dispose pas de traitement efficace, on utilisera un placebo comme comparateur.

La question éthique est centrale concernant les essais thérapeutiques. Un article publié dans la revue Exercer[2] explique que certains auteurs peuvent se tromper en justifiant leur démarche scientifique par le fait que les bénéfices du traitement ne peuvent être que supérieurs aux effets négatifs. Ainsi ces auteurs risquent de penser à tort que si le patient survit c’est grâce au traitement, alors que s’il décède, c’est à cause de la maladie. De plus l’article répond à la question de traitement par placebo par deux remarques. La première remarque : le groupe contrôle reçoit le traitement de référence et alors réduire la prise en charge des patients à la seule prise d’un placebo est probablement inapproprié. La seconde remarque : dans une maladie qui n’amène pas à 100 % de décès, l’incertitude du rapport bénéfice/risque d’un traitement est toujours moins sûre que le placebo.

Lecture critique d’un essai thérapeutique[3] :

Pour le clinicien, la question est de savoir si les résultats justifient un changement de pratique.

La réponse à cette interrogation s’obtient par l’analyse des trois points suivants :

  1. La validité interne : Est-ce que le résultat est fiable, c’est-à-dire est-il réel et non biaisé ?
  2. La cohérence externe : Est-ce que ce résultat est confirmé par d’autres et est-il concordant avec les autres connaissances sur le sujet ?
  3. La pertinence clinique et la représentativité : Ce résultat représente-t-il un bénéfice cliniquement intéressant et est-il extrapolable aux patients à traiter en pratique ? On peut avoir un résultat significatif sans qu’il ait une pertinence clinique.

La validité interne comprend :

  • La validité de la démarche scientifique. Il convient d’éliminer la possibilité que l’hypothèse ait pu être formulée après la prise de connaissance des résultats de l’essai.
  • La réalité statistique du résultat. Une différence observée entre deux groupes peut être soit réelle, soit due au hasard. Le risque de conclure à tort à un effet du traitement est le risque alpha (en général 5%).
  • Absence de biais. Il y a biais quand la différence observée entre les deux groupes à la fin de l’essai est due à un autre facteur que le traitement étudié.

La cohérence externe :

La cohérence externe d’un essai se juge en confrontant son résultat à la somme des connaissances accumulées sur la question.

La cohérence externe d’un résultat positif peut être remise en cause si :

  • L’essai est le seul disponible car il est impossible d’écarter une autre origine du résultat.
  • Le résultat n’est pas compatible avec les connaissances physiopathologiques, pharmacologiques ou épidémiologiques.
  • La méta analyse ne donne pas de résultat statistiquement significatif, alors le résultat de l’essai est dû au hasard, c’est un faux positif.

La pertinence clinique :

Cela permet de voir que le traitement a un rapport bénéfices / effets indésirables acceptable et que ce résultat est extrapolable à la pratique médicale connue.

La pertinence clinique dépend de plusieurs critères, notamment :

  • Il faut que le traitement de comparaison soit adapté, ainsi si un traitement de référence existe, il ne faut pas réaliser une étude contre placebo.
  • Le critère de jugement peut être remis en cause s’il reflète seulement un mécanisme biologique ou pharmacologique, s’il est composé de plusieurs critères, ou si c’est un critère continu comme une échelle.
  • Il faut aussi analyser les traitements interdits par le protocole.
  • La représentativité des patients inclus dans l’étude, afin de savoir si l’efficacité obtenue sur les patients de l’essai l’est aussi pour la population ciblée.
  • De l’intervalle de confiance qui doit être suffisamment précis et tenir compte du plus petit effet possible avec la borne inférieure.
  • Du rapport bénéfice/risque en prenant en compte la gravité des effets indésirables par rapport à la gravité de la maladie et à celle des événements évolutifs évités par le traitement.

La lecture critique des essais est une des bases de l’evidence based medicine (EBM). Cette lecture s’appuie sur l’analyse méthodologique et statistique des données mais également sur les connaissances cliniques et humaines. Il est important pour sa pratique clinique de s’intéresser à cette démarche même si parfois elle est complexe car elle permet de se faire sa propre idée et de voir l’intérêt d’une étude pour sa pratique.


Sources

  1. Frappé P. Initiation à la recherche, 2ème édition : Global média santé. 2018.
  2. Rat C, Tudrej B, Penchaud A-L et le comité d’éthique du collège national des généralistes enseignants. Enjeux éthiques associés à la crise sanitaire du COVID-19. Exercer. 2020 Avril, 31(162) : 165-7
  3. Cucherat M. La lecture critique des essais thérapeutiques. La Lettre du Pharmacologue.2002